Foster Warren Cunningham voilà un peu plus de 32 ans que je porte ce nom … personnellement ce n'est pas celui que j'aurais choisi mais puisque nul n'a le loisir de choisir le nom auquel il répondra au cours de son existence je n'ai eu d'autre choix que de m'y faire et au final je me dis que ce n'est pas si mal après tout j'aurais bien pu hériter de Jean Culle je loue donc le ciel de ne pas avoir hérité de parents atteint d'un tel niveau de débilité.

Étant un enfant de New York , j'y ai grandi, j'ai toujours ressenti l'ardent besoin de m'y arracher afin de partir à la découverte du monde. Tout ce que je faisais ou entreprenais se voulait en ce sens. Mes parents avaient beau tout mettre en œuvre afin de me préparer à prendre, éventuellement , leur relève à la tête de cette librairie que notre famille opérait en plein cœur de Brooklynn je divergeais totalement sur cette vision qu'ils se faisaient de mon avenir. Je désirais partir au large et rien n'allait m'en empêcher. Déjà gamin j'avais un sacré caractère.

Si gamin j'étais difficile à tenir il convient d'admettre que l'adolescence fit de moi quelqu'un de totalement incontrôlable, s'il y a un truc qui me caractérisait merveilleusement bien c'était certes cette propension que j'avais à vouloir tout régler avec mes poings. Impétueux je ne reculais devant personne et je dois admettre que j'aimais bien me battre … au grand dam de mes parents qui voyaient , évidemment, poindre à l'horizon ces jours ou mes penchants belliqueux allaient finir par me foutre dans une merde d'enfer.

À force de consommer de l'alcool et de frayer avec des gens fort peu recommandables il m'arriva ce qui devait immanquablement m'arriver. Comme dans une partie de Monopoly je finis par me retrouver par la case prison. Heureusement pour moi le flic qui s'était occupé de mon dossier, j'étais encore mineur, réalisant qu'au fond je n'étais pas un mauvais bougre décida de me tendre la main afin de m'aider à me sortir de cette fâcheuse situation dans laquelle je m'étais retrouvé bien malgré moi. Étant un entraîneur de boxe il décida de me prendre en charge et de m'inculquer une discipline qui me faisait cruellement défaut à l'époque.

Bien entendu le fait de m'entraîner et de suivre un mode de vie empreint d'une discipline plus rigoureuse avait été de nature à me tenir éloigner des sources de tentations mais je désirais toujours prendre le large. New York n'était pas pour moi plus que jamais j'en avais la conviction.

Je me débrouillais plutôt bien sur un ring, en fait j'étais vachement doué mais la modestie m'empêche de trop me lancer dans ce genre d'éloges me concernant, à l'âge de 18 ans je comptais déjà 30 combats chez les amateurs et je n'en avais pas perdu un seul … inutile de dire que je commençais à avoir la grosse tête. C'est alors qu'un influent promoteur de la côte ouest vint me voir avec une offre formelle de contrat afin de me faire passer chez les professionnels et bien que mon entraîneur, et mentor, jugeait que le tout était pour le moins prématuré je décidai d'accepter l'offre. Après tout quitter New York n'était-il pas mon rêve?


Fraîchement installé à San Francisco tout semblait aller parfaitement bien. Ma carrière de boxeur professionnel prenait de plus en plus d'ampleur, je connaissais un succès fou avec les femmes … l'argent coulait à flot et l'abondance m'avait conduit à mener une vie pleine d'excès.

C'est à l'âge de 25 ans que ma vie vacilla. Fort d'une fiche professionnelle de 25 victoires et aucune défaite on m'offrait l'opportunité d'une vie soit celle de combattre pour le titre ultime soit celui de champion mondial poids lourds. J'ignorais totalement , à cette époque , que je n'étais pas dans un état pour me battre … mon entourage m'avait caché le fait que le médecin était d'avis que j'étais atteint de troubles neurologiques. Vous le comprendrez aisément lors de ce combat j'ai heurté un mur … de plein fouet.

Le réveil s'avéra des plus brutal, non seulement je venais de réaliser que mon rêve venait de s'évanouir mais en plus je venais de réaliser que mon entourage m'avait utilisé. Je n'avais plus d'amis, mon argent totalement envolé ... même ma femme venait de me quitter et demander le divorce . En termes clairs je venais de me faire enculer par la vie.

Évidemment le fait de devoir revenir à la maison, tel un enfant prodigue, la queue entre les deux jambes était loin de me réjouir. Cet arrière goût, plus que amer, de défaite m’insupportais au plus haut point … je craignais de devoir affronter les regards de mes proches d'autres fois qui ne verrait en moi qu'un perdant … qu'une personne qui n'avait pas les moyens de ses ambitions.

Bien sur le tout ne se régla pas en un claquement de doigt, les retrouvailles avaient été tout aussi difficiles que mouvementées mais au final, chacun mettant de l'eau dans son vin, nous finîmes par nous retrouver un peu comme si au final nous ne nous étions jamais quitté.

Maintenant que je suis de retour dans la Grosse Pomme, depuis quelques années déjà, j'ai finis par épouser ce parcours auquel me destinait mes parents. Je suis maintenant le patron de la librairie … preuve qu'il avait été tout aussi futile qu'illusoire de croire que je pourrais fuir mon destin. Évidemment gérer une librairie est beaucoup plus pépère que de devoir monter dans un ring de boxe afin de s'échanger quelques coups mais croyez-moi il s'agit là d'une accalmie de laquelle je m’accommode plutôt bien.

Ceux qui me voit aujourd'hui peine à me reconnaître. Du jeune homme arrogant, têtu, obstiné, bagarreur et pour le moins rancunier que j'étais je me démarque maintenant par mon calme, mon ouverture d'esprit, ma générosité et mon empathie … il faut dire que de recevoir une multitude de coups à la tête, et de devoir vivre pour le reste de ses jours avec les séquelles découlant de quelques commotions cérébrales , ne peuvent que changer une personne. Que penser de ce changement? Allez le demander aux gens qui me connaissent.