Il y a bien un moment où il faut finir par parler, par s'ouvrir, par ouvrir son coeur, sinon, on risque sans doute de gâcher sa vie, d'assassiner le bonheur et on se condamne soi-même à la solitude. ETHAN & OCTOBER

Accoudée à la fenêtre, mon regard se perd dans les rues un peu plus bas. Il est tôt mais déjà la ville est en effervescence. L’agitation est visible, presque papable. Nul doute qu’on se trouve dans la Grosse Pomme. De plus, le quartier de Manhattan étant celui des affaires, il n’était pas étonnant de voir du monde à cette heure matinale. C’était dingue à l’allure à laquelle tout ce petit monde grouillait. C’était totalement captivant d’observer la vie autour de nous. Du moins, c’était une chose que j’aimais beaucoup faire. J’avais la sensation d’être ma bulle, comme si pour moi le temps s’arrêtait tout à coup. Mais cela ne durait jamais bien longtemps… La réalité finit toujours par nous rattraper, qu’on le veuille ou non. Je jette un œil à l’horloge murale. Mon premier patient devrait arriver dans une dizaine de minute environ. C’était un patient régulier, un homme que je suivais depuis des mois et qui avait fait des progrès considérables. Mon boulot était la chose dont j’étais la plus fière. J’avais réussi dans ce domaine qui depuis toujours m’attirait. J’avais travaillé dur durant des années mais au final j’avais obtenu ce que je voulais tant. Être psychologue était plus qu’une envie, plus qu’un travail, c’était une vocation. Une passion qui me permettait d’être encore debout aujourd’hui…

Mon rendez-vous se termine et je raccompagne le jeune homme jusqu’à l’entrée de mon bureau. Madame Jefferson, ma secrétaire, allait s’occuper de lui pour notre prochaine entrevue. C’était encore assez étrange pour moi d’avoir une secrétaire et un bureau dans un quartier si luxueux. J’avais d’abord exercé à l’hôpital, où j’avais appris énormément de choses et où le côté humain était plus que développé. J’étais sortie grandi de cette expérience et de ces années passées aux côtés de ces gens formidables. Si j’avais su m’en sortir et ouvre mon propre cabinet c’était aussi grâce à un homme. C’était le père d’une petite fille dont je m’occupais quand je travaillais à l’hôpital. C’était un homme riche mais incroyablement généreux. Lorsqu’il avait su ce que je rêvais de faire il n’avait pas hésité une seule seconde à me proposer son aide. En effet, il possédait des bureaux à Manhattan qu’il louait à des particuliers ou à des entreprises. Il avait décidé de me sous-louer l’un de ses bureaux. Sans ça, je n’aurai jamais eu les moyens de me permettre d’ouvrir mon cabinet ici. Et même si cela faisait peut-être tape à l’œil je connaissais mes valeurs et c’était tout ce qui comptait.  

J’entendis quelques coups frappés à ma porte et vis la tête de Madame Jefferson apparaître. « Votre rendez-vous vient d’arriver Mademoiselle Tyler. » Je lui adressais un sourire. « J’arrive tout de suite. » Le patient qui m’attendait était nouveau. Je ne l’avais jamais vu. Peut-être parce qu’il n’était jamais venu au rendez-vous qui avaient été fixés auparavant… J’étais alors légèrement surprise de voir que cette fois-ci il avait fait le déplacement. Je me dirigeais vers la salle d’attente d’un pas confiant et posais mon regard sur cet homme d’une trentaine d’années environ. « Monsieur Williams ? » Il se leva alors. Je lui tendis la main en signe de politesse. « Mademoiselle Tyler, enchantée. » Je lui serrai la main avant d’ajouter « Veuillez me suivre s’il vous plaît. » Alors que je m’asseyais derrière mon bureau, je lui fis signe de s’installer la chaise face à moi. Je voulais d’abord discuter un peu avant lui avant d’entamer des séances plus profondes. Il fallait que j’en sache plus sur lui. Mais par son attitude, il montrait qu’il était fermé, presque froid. Ses bras fermés sur sa poitrine n’annonçaient rien de bon. Il risquait de ne pas être enclin à discuter. C’était pourtant ce qu’il allait devoir faire, qu’il le veuille ou non. Je n’étais pas payée à regarder un homme se terrer dans le silence. Il en était hors de question. « Tout d’abord, avant de pouvoir vous aider, j’ai besoin de savoir pourquoi vous êtes là. Qu’est-ce qui vous a poussé à consulter une psychologue ? Je note d’ailleurs que vous n’êtes venu à nos précédents rendez-vous. Était-ce voulu ? » Je me doutais de la réponse mais c’était de sa bouche que j’avais besoin de l’entendre. Ce rendez-vous risquait d’être électrique… Ça se ressentait déjà dans l’atmosphère.
Prépare toi October, prépare toi…