Toutes les histoires de princesse commencent par « il était une fois ». Le seul truc c’est que je suis loin d’être une princesse. J’ai très vite compris que je n’aurais pas le droit d’avoir tout ce que je veux. La première chose à savoir est que je n’ai pas de père. Il est partit lorsque j’avais à peine huit mois. Il faut dire aussi que lorsque je suis née mes parents étaient jeunes. Trop jeune pour assumer un enfant peut-être. Mais mon paternel a préféré fuir plutôt que d’assumer. Est-ce que je peux lui en vouloir ? Non mais je le fais quand même. Ma mère a toujours enchaîné les petits boulots et les conquêtes d’un soir. Elle était triste. Elle se sentait seule. Moi, j’ai grandi dans un monde comme ça. Sans vraiment de repère. Je souriais lorsque j’avais envie de pleurer. Je me taisais lorsque j’avais envie de crier. En secret, je voulais m’envoler vers d’autres horizons. Changer de vie. Mais même avec toute la bonne volonté du monde, je n’aurais pas pu. J’ai donc appris très tôt à me débrouiller toute seule. J’avais moins de dix ans lorsque je devais me préparer à manger seule le soir. Je faisais des plats simples, je mangeais toujours la même chose mais qu’importe. Au final, on s’y fait.

Scolarisée dans une école publique de Moscou, je n’ai jamais été intéressé par les cours. J’ai toujours détesté rester assise toute une journée sur les bancs des classes de cours à écouter un professeur inintéressant. J’ai toujours été cette fille entourée d’amis, assise au fond de la classe à refaire le monde. Je parlais tout le temps, j’avais des notes moyennes. Juste ce qu’il fallait pour passer dans la classe supérieur. Au collège, je deviens pire. Je n’écoute rien. Je sèche les cours. Je traine avec des gens plus âgés que moi, peu fréquentable. J’ai à peine treize ans lorsque je vais à ma première soirée. Première cuite. Première fois que je bois de l’alcool. Et première fois que je couche avec un garçon, dont je ne connais pas le nom. Je me moque de ce que les autres peuvent penser de moi. Je me moque de ce qui pourra être raconté le lendemain sur moi. De toute façon, je n’ai plus beaucoup de souvenir de cette soirée-là. Ma mère ne voit même pas que je commence à prendre le mauvais chemin. Elle s’en moque. Je suis jeune. Je dois profiter de ma vie selon elle. Moi, intérieurement, ça me rend triste. J’aimerais qu’elle me dispute de temps à autre. Mais elle n’en fait rien.

Je grandis. J’évolue. A quinze ans, je commence à fumer. Pour me donner un genre plus qu’autre chose. Les années lycées sont le coup de grâce pour la simple et bonne raison que j’arrête les cours à l’âge de seize ans. Déscolarisée, sans emplois, sans ambitions non plus, j’enchaîne les conneries. Ca va du petit vol à l’étalage au petit deal de banlieue. Rien de bien méchant dans le fond mais ma mère se moque de ce que je fais de mes journées. Je sors avec des garçons qui me veulent simplement dans leur lit. Je joue les filles naïves pour qu’ils obtiennent ce qu’ils veulent de moi. Mais dans le fond, j’ai mal. J’ai l’impression d’avoir grandi dans un monde, sans amour et ça fait mal. Mais je garde la tête haute. Ils n’ont pas le droit d’avoir le pouvoir sur moi. Ils n’ont pas le droit de me voir triste. Pendant un an, j’ai fait des activités plus ou moins illégales qui m’ont fait gagner un petit d’argent que j’ai mis de côté.

Il y a six mois, j’ai décidé de prendre ma vie. J’ai décidé de partir à l’autre bout du monde. Vivre le rêve américain comme je l’avais si bien dit à ma mère. Elle m’a simplement souhaité bonne chance. Elle n’a pas cherché à me retenir. Alors j’ai pris l’avion. En quelques heures, j’ai débarqué à New-York. J’ai trouvé une chambre dans un hôtel minable du Bronx et dès le lendemain je faisais le tour des agences de mannequinat. Personne ne voulait de moi, soit parce que je n’avais pas d’expérience. Soit pour d’autres raisons toutes aussi inutiles les unes que les autres. Voyant que je perdais mon temps, j’ai pris le premier job que je trouvais : Escort girl. J’accompagne des hommes riches à des cocktails. Je gagne pas mal d’argent. J’ai même le droit à des cadeaux de leur part. J’ai décidé de louer un appartement dans le Queens. Tout l’argent de mon job passe dans les fringues de luxe, les sacs et les chaussures. Je ne perds pas de vue mon objectif de devenir mannequin de lingerie. Je sais que j’ai le potentiel qu’il faut pour ce métier. Il fait juste trouver le contact qui me fera accéder au graal. J’ai aussi envie de prouver à ma mère que rien n’est impossible et que ce n’est pas parce qu’on sort des quartiers pauvres qu’on doit s’apitoyer sur son sort, comme elle l’a fait.