Cher Journal,

Je ne suis pas un habitué de ce genre de chose, tenir un journal, alors tu ne m'en voudras pas je suppose si ma façon de m'adresser à toi est quelque peu simpliste, je te parlerais comme on fait avec un ami, bien que tu ne sois qu'un simple cahier. Tout d'abord, commençons par les présentations. Je me nomme Silas Beaudelaire et non, je n'ai aucun lien avec la famille de l'écrivain, d'ailleurs tu remarqueras que l'orthographe de nos noms de famille sont différents. Je suis né il y a quarante-et-un ans dans la belle ville de Paris. Et oui, je suis français d'origine. Je suis le second fils de Martha et Vincent Beaudelaire, j'ai un frère aîné de qui j'ai toujours été très proche, il était mon modèle lorsque nous étions enfants et aujourd'hui il est la personne que j'appelle lorsque j'ai une décision à prendre, lorsque j'ai besoin de conseils, car même s'il peut sembler léger et insouciant en apparence, il ne faut pas s'y fier, il sait être sérieux lorsqu'il le faut, surtout lorsque cela me concerne. Il a toujours été très protecteur avec moi, je pense que cela date du moment où j'ai eu mon petit "incident". Cela s'est passé j'avais cinq ans et mon frère en avait douze. J'étais sous sa responsabilité. Ce qu'il faut savoir c'est que depuis tout petit je suis un "fonceur", je fonce dans le tas tête baissée comme on dit, sans me soucier du danger. Or donc, j'étais monté dans un arbre, j'avais échappé pour une fraction de seconde à l'attention de mon frère. Je voulais voler et quoi de mieux que de monter dans un arbre pour décoller, après tout les petits oiseaux commencent bien depuis leur nid. J'entendais mon frère qui m'appelait, je l'ai interpellé et j'ai vu son visage devenir tout blanc, il faut dire que j'étais assez haut. Mon frère me criait de redescendre ensuite il se contredisait, me disant de ne pas bouger, ajoutant qu'il arrivait. Je ne l' ai pas écouté et j'ai sauté. Naturellement, vous vous doutez bien que je ne me suis pas envolé. Ma tête a cogné sur la pelouse, la chance que j'ai eu, c'est qu'il y avait un tas de feuilles qui a amorti un peu ma chute, mais je suis resté inconscient pendant plusieurs heures. Lorsque je suis revenu à moi, j'étais allongé dans mon lit, mais pas pour longtemps, ma mère voyant que j'avais repris connaissance, me transporta immédiatement à l'hôpital. Elle a bien fait, je fus rapidement pris en charge et les médecins découvrirent qu'un petit caillot de sang commençait à se former dans mon cerveau, il fallait opérer.

Je m'en sorti assez bien, mais après cet épisode, mon frère "renforça" sa protection à mon égard. Aujourd'hui encore il lui arrive d'entendre le bruit qu'a fait ma tête lorsqu'elle a rencontré le sol. Il s'en souviendra toute sa vie je pense. A mes vingt ans, il m'offrit un baptême de l'air en hélicoptère, me disant que c'était la seule et unique façon que j'aurai de voler. Si je te dis qu'il m'a accompagné ce jour là, je te surprends ?


Mais je vais un peu vite en besogne, avant mon baptême de l'air, nous avions déménagé à New-York depuis dix ans déjà. Mon père avait obtenu un poste dans la filiale new-yorkaise de sa société et c'était beaucoup mieux payé qu'en France. Voilà pourquoi quand j'ai eu dix ans toute la famille déménagea dans la Grosse Pomme. Naturellement, le changement fut drastique et ce fut assez difficile de s'adapter, même pour un enfant de dix ans, mais au bout de trois ans, je passais pour un véritable new-yorkais...oui enfin mis à part mon accent français qui ressort encore quand je suis fatigué.

A dix-huit ans j'eus mon bac et entrais à l'université pour poursuivre mes études. Je voulais être Kiné, je devais donc énormément bosser, si bien que cela ne me laissait guère de temps pour ma vie privée. Je me savais gay depuis l'âge de quinze ans et l'annonce à ma famille se passa sans problème aucun, bon bien sûr mes parents ont eu un peu de mal à l'accepter, mais ils ne m'ont jamais rejeté.

A vingt-deux ans je fus diplômé et commençais à pratiquer mon métier dans un cabinet en ville. Cela ne fait que dix ans que j'ai mon propre cabinet à Manhattan, classe non ?

Professionnellement tout va bien pour moi, mais côté vie privée, j'ai eu quelques aventures, la dernière en date s'est assez mal terminée, je ne reviendrais donc pas dessus, mais j'espère sincèrement rencontrer un homme bien, quelqu'un avec qui je pourrais construire quelque chose de sérieux. En attendant, je partage mon temps entre mon cabinet, des visites régulières à mon frère et nos parents et des soirées entre amis.

Voilà, c'est à peu près tout ce qu'il faut savoir sur moi. A bientôt.